Habiter poétiquement le monde avec Felwine Sarr

Felwine Sarr est professeur d’Études françaises et francophones au département d’Etudes romanes de l’Université de Duke en Caroline du Nord. Économiste de formation, porteur d’espoir pour les générations futures, il est une des voix essentielles de l’Afrique, à l’origine d’une importante œuvre intellectuelle et philosophique (Afrotopia 2016 ; Habiter le monde 2017 ; Écrire l’Afrique-Monde 2017, avec Achille Mbembé ; Restituer le patrimoine africain 2019, avec Bénédicte Savoy ; L’économie à venir, les liens qui libèrent, 2022, avec Gaël Giraud). Felwine Sarr est aussi écrivain (Dahij 2009 ; 105, rue Carnot 2011 ; Méditations africaines 2012 ; Ishindenshin 2017 ; La Saveur des derniers mètres 2021 ; Traces – Discours aux Nations africaines 2021). Il est en outre l’éditeur du Prix Goncourt 2021, La plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr. A l’occasion de son passage à Soleure, nous avons voulu l’interroger sur le versant littéraire de son travail et sur son dernier roman Les lieux qu’habitent mes rêves, Paris, Gallimard 2022.

Felwine Sarr, la notion de lieu semble revêtir une importance particulière dans votre œuvre intellectuelle et littéraire, par exemple à partir de votre essai Afrotopia ou de votre dernier roman Les lieux qu’habitent mes rêves.

En effet, dans mon premier roman déjà, Dahij, j’explorais la notion de lieu plutôt dans la perspective du retour à soi ou d’une quête de soi, permettant en même temps de sortir de soi, d’affronter et de déborder les lieux qui nous sont assignés. L’écriture visait ici à trouver un espace qui ouvre vers d’autres lieux, une hétérotopie, à travers une recherche personnelle qui explorait la verticalité ou la profondeur de soi. Je m’intéressais aux processus d’écriture pouvant être des actes de déconstruction ou de reconstruction de soi. Dans Afrotopia, qui appartient à un autre genre, celui de l’essai, j’ai voulu suggérer que d’autres lieux sont possibles pour l’Afrique, qu’elle peut habiter un espace plus vaste, chercher à faire une communauté monde. C’est une utopie, non pas une chimère, mais une utopie active, un travail sur les imaginaires bien réels, pour penser les richesses actuelles et les potentialités d’une Afrique à venir. Dans La Saveur des derniers mètres, à nouveau une œuvre littéraire, je m’aventurais plutôt vers des lieux sensibles, la dimension charnelle du monde, à travers le voyage, depuis les lieux de mon enfance au Sénégal vers des villes comme Mexico, Le Caire ou Port-au-Prince. 

Votre dernier roman met en contraste de nombreux lieux géographiques, entre le Sénégal et l’Europe. Ses chapitres convient le lecteur à de grands sauts, par exemple d’une université française à la célébration d’un vendredi saint à Varsovie, vers des lieux plus métaphysiques, notamment autour des croyances du peuple sérère. Pourquoi ces déplacements ? 

Avec Les lieux qu’habitent mes rêves, j’avais envie d’écrire un roman avec des personnages que l’on puisse suivre, à commencer par les personnages centraux, deux frères jumeaux, Fodé et Bouhel, dont le premier reste dans le pays de ses ancêtres, le peuple sérère – auquel j’appartiens –, et Bouhel qui part à la découverte de l’Europe, pour des études littéraires à Orléans et un parcours qui va l’amener à Varsovie, puis Genève. Bouhel découvre le monde à sa manière et sort transformé de ce voyage plein de promesses, avec une part de souffrance. Mais je voulais montrer qu’il existe aussi d’autres lieux possibles, des lieux en intensité, des voyages en profondeur. Ce sont ces lieux qu’explore Fodé, resté au pays, mais qui fait aussi un parcours de décentrement de soi pour devenir maître de cérémonie sérère. Je voulais suggérer encore que malgré la distance géographique, les deux frères restent liés : par exemple, même s’il n’est pas présent physiquement, Fodé aide son frère Bouhel lorsqu’il est en prison à Varsovie. Cela peut paraître étonnant, mais c’est assez naturel dans les croyances sérères.

Dans un chapitre qui fait écho au titre du livre, vous précisez les différentes modalités du rêve, le rêve éveillé qui voyage dans l’imaginaire, le souvenir de la beauté ou de l’amour, l’épreuve du corps, et la poésie, comme un rappel des quatre folies ou enthousiasmes divins du Phèdre de Platon. Pourriez-vous préciser votre rapport à la poésie, au sens large comme création ou au sens restreint comme genre littéraire?

La poésie est une force créatrice, son imaginaire permet un élargissement du monde. La poésie en vers a été mon premier geste d’écriture, par exemple dans le recueil Ishindenshin, de mon âme à ton âme. Mais si l’on reste, disons, aux belles métaphores, on ne fait pas de poésie. J’ai voulu suggérer dans ce chapitre qu’une vraie conversion est nécessaire pour ne pas rester «au seuil de la poésie», pour tendre vers cette expérience dont René Char ou Rimbaud ont saisi l’exigence de lucidité et le dévoilement. Mais en effet, j’explore de nombreux genres autres que la poésie. Il est essentiel que le signifié trouve son signifiant. Quelque chose se donne ou doit être dit, et le genre s’impose assez naturellement. Le roman convient pour un certain donné, ou pour une intuition, l’aphorisme, que j’ai proposé dans les Méditations africaines, ou encore l’essai, par exemple dans Afrotopia ou Habiter le monde. Dans tous les cas, je cherche toujours une justesse, une essentialité ou une économie du langage. 

Un aspect particulier du roman est la pluralité des voix narratives : certains personnages parlent chacun à la première personne, selon leur propre point de vue – c’est le cas de Bouhel ou de son amie Ulga -, mais d’autres personnages sont racontés par un narrateur externe, à la troisième personne, dans le cas de Fodé. Pourquoi ces choix ? 

Oui, Bouhel parle à la première personne, c’est en quelque sorte le personnage central que l’on suit à travers le roman, et le narrateur externe me permettait de mettre un peu plus de distance par rapport à Fodé. Mais le plus important pour moi était de montrer les chemins parallèles et différents de deux jumeaux monozygotes. D’une part l’altérité des deux jumeaux, d’autre part l’altérité à soi ou l’auto-altérisation de Bouhel, mais aussi celle de Fodé. Ce dernier, s’il n’a pas forcément choisi de succéder au maître de cérémonie Ngof, n’est pas figé dans son identité. Il explore le milieu sérère, ses expériences le changent. Le rêve joue ici un rôle important. Je voulais vraiment proposer une réflexion sur l’identité, l’ipséité, qui ne se réduit pas à un point fixe ou figé. D’autre part, le roman se voulait une réflexion sur la fraternité. Dans le Livre de la Genèse, le premier couple de frères amène à un fratricide. Dans ce récit, je voulais montrer un autre rapport de fraternité, qui ne se limite pas au lien biologique, mais se construit sur l’ensemble du roman.

Précisément, Bouhel, après certaines épreuves, va trouver du réconfort lors d’une retraite dans un monastère bénédictin, en Suisse. Il y rencontre le Frère Tim. Malgré leur différence d’appartenance religieuse, ils sont très proches dans leur réflexion sur la foi. Bouhel lit des mystiques chrétiens ou musulmans, comme Maître Eckhart ou Rûmi. Vouliez-vous suggérer un rapprochement possible entre les religions ? Et pourquoi la Suisse ?

Oui, la Suisse est le lieu de résidence de Bouhel au début, au milieu et à la fin du roman, mais dans une temporalité non linéaire du récit. Le roman s’ouvre en quelque sorte par la fin, et retrace ensuite l’histoire à travers les rêves de Bouhel. Il a trouvé dans ce lieu calme de lacs et de montagnes un refuge, qui lui permettra peut-être de prendre un nouveau départ, de commencer une nouvelle histoire. Pour ce qui est du monastère, c’est un lieu qui se prête à la méditation. Pour l’anecdote, je suis venu à Genève une première fois pour voir un ami et une autre fois pour le Salon du livre. J’avais été logé sans le vouloir dans une même rue, ce qui a peut-être influencé cet aspect de circularité de mon récit. En ce qui concerne les religions, j’ai eu l’occasion d’explorer diverses traditions comme le soufisme ou le bouddhisme. Mais dans ce livre j’avais à cœur d’instaurer un dialogue entre la cosmologie sérère et la mystique chrétienne. 

On suit de près dans le roman toute la préparation de la cérémonie du Ndut dans la tradition sérère, dont Fodé est devenu le nouveau maître. En même temps, dans cette fragmentation des lieux, on se retrouve par exemple, après le rite sérère, non pas dans la sagesse de Maître Eckhart, mais dans le délire mystique de Vladimir qui se met lui-même en danger, ainsi que sa famille. Qu’est-ce que la voix de Vladimir veut signifier dans le roman ?

Il était important pour moi de représenter les cosmologies et les croyances sérères. Malgré certains récits qui pourraient surprendre le lecteur, montrer leur caractère de dignité. L’épisode d’initiation pour Fodé continue par exemple au-delà de la mort de son maître, Ngof. Au septième jour, il doit sortir de son corps pour aller à la cime de l’arbre afin de terminer l’initiation. Il n’y a rien à prouver, c’est une croyance naturelle pour le peuple sérère. En revanche, pour ce qui est de Vladimir à Varsovie, le frère d’Ulga, c’est assez différent. Il souffre de graves problèmes psychologiques, il est sur une ligne de crête. Le pas vers la folie peut être très vite franchi. Mais Vladimir a tout de même quelque chose à dire. Sa vision du monde néolibéral par exemple n’est pas fausse. Il n’y a pas de parole interdite. 

J’aimerais vous poser une dernière question sur l’engagement de l’écrivain. Pourriez-vous nous dire quelques mots sur le livre de Boubacar Boris Diop, Murambi, le livre des ossements, qui a choisi la forme du roman pour décrire les crimes du Rwanda de 1994 et le déchirement d’un peuple frère. Le Rwanda vit aujourd’hui à nouveau en paix. Est-ce un signe d’espoir de fraternité, dans la ligne de votre travail ?

Murambi est un texte magnifique, très important. En 1998, quatre ans après le génocide, une dizaine d’écrivains africains ont été invités à Kigali pour un séjour d’écriture, un travail de réflexion et de mémoire. Pour la question de l’engagement, on a eu souvent tendance à distinguer deux courants dans la littérature africaine postcoloniale, des écrivains qui mêlaient l’existentiel et le politique, et une nouvelle génération d’écrivains qui seraient désengagés du politique. C’est une schématisation erronée. Même si l’on observe chez les écrivains de ma génération une liberté plus grande par rapport aux assignations géographiques ou territoriales, cela n’implique ni un renoncement à nos appartenances, ni un abandon du politique. Oui, le cas du Rwanda montre que l’on peut reconstruire, même si tout n’est pas parfait. Ce qui est essentiel surtout, c’est que l’on crée des réalités avec les imaginaires, notamment pour les jeunes générations. Le catastrophisme en politique ou en écologie n’amène à rien. Les mondes que nous évoquons sont des possibles qui s’ouvrent à nous et que finalement nous choisissons. La parole, qu’elle soit poétique ou politique, joue ici un rôle essentiel.

Une rencontre tout en fraîcheur

Un moment fort sympathique, riche en nouvelles connaissances. Voilà comment je pourrais qualifier l’entretien que j’ai réalisé avec Yann Stutzig, futur traducteur de renom.

Quelles raisons me font voir en lui le potentiel de grandes choses ? Déjà, son parcours professionnel montrant sa volonté de déterrer l’idée d’être traducteur qui germait dans sa tête depuis des années. Il a par exemple suivi un programme de spécialisation en traduction à l’Université de Lausanne ou encore une formation au Centre Européen de Traduction Littéraire (CETL).

Mais aussi ses recherches fructueuses pour le premier de ses ouvrages traduits, La payîsanna, de Noëmi Lerch. Pour ce travail, il a ajouté à sa pile de livres de chevet des dictionnaires d’helvétismes qui lui ont permis de jouer avec des mots campagnards et montagnards, faisant honneur à la version d’origine en suisse allemand. 

Et encore sa passion. Il me raconte que, gamin déjà, il retenait des noms comme François Kérel, traducteur de L’insoutenable légèreté de l’être, de Milan Kundera. 

Par son humilité, il tente de rester au plus proche du texte. Et il trouve formidable d’avoir l’opportunité de prendre la parole dans le cadre des Journées Littéraires de Soleure. Mais attention, on ne s’improvise pas traducteur ou traductrice. Il faut maîtriser la langue à la perfection, mais surtout savoir prendre le temps. La patience est plus que nécessaire selon Yann Stutzig. 

Mais je pense qu’avant tout, il possède la petite étincelle. Parmi les retours sur ses traductions, on lui dit que l’essentiel est là, il a réussi à traduire la poésie de Noëmi Lerch. Selon lui, « c’est tout naturel », ça coule un peu de source. La magie opère et le défi est réussi quand on ne sent pas l’allemand derrière le texte en français. 

Deux ouvrages conseillés par Yann Stutzig: 

L’ingrate venue d’ailleurs, d’Irena Brežná, traduite par Ursula Gaillard

En finir avec Eddy Bellegueule, d’Edouard Louis

«Tout le monde écrit, personne ne lit» -rencontre avec Philippe Testa

Avant ma rencontre avec Philippe Testa, je ne vous cache pas mon stress. Interviewer quelqu’un est un exercice difficile. En arrivant au Kino im Uferbau, j’appréhende beaucoup cet entretien : parlera-t-il de son plein gré ou faudra-t-il lui tirer les vers du nez ? suis-je assez préparée ? mes questions sont-elles pertinentes ? Tous ces doutes me prennent la tête et pourtant, à peine arrivée face à lui, ce stress disparaît. Il émane de lui quelque chose de rassurant et de bienveillant. Bavarder avec lui est un pur plaisir. Il m’a tout de suite mise à l’aise et m’a même donné quelques astuces pour mes futures interviews. Un grand moment de partage dont je me souviendrai. Merci !


Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ? Est-ce que vous vous rappelez de vos premiers écrits ?
En cours de français, le prof nous avait fait lire Les Fleurs du mal de Baudelaire et nous avait demandé de faire des alexandrins. Tout de suite, je me suis pris au jeu, j’ai aimé faire ça et j’ai découvert le plaisir d’écrire, d’arriver à faire quelque chose dont on est satisfait ; satisfait même si rétrospectivement des années après, ça vaut ce que ça vaut. [Rires]
Quelque temps après, j’ai commencé à écrire des nouvelles et depuis je n’ai jamais arrêté de créer. Des nouvelles, des romans un peu nuls, des romans noirs. Écrire a toujours été présent depuis mon adolescence, avec beaucoup de plaisir et, bien sûr, pas mal de prises de tête et d’angoisses. Comme je faisais aussi de la musique, j’aimais énormément ce côté créatif en groupe et, parallèlement, j’appréciais l’aspect solitaire de l’écriture.


Est-ce que les thèmes dans vos romans sont «toujours» les mêmes ou y a-t-il des variations ?
Les sujets de ma jeunesse n’ont plus grand-chose à voir avec mes thèmes actuels. Je ne dirais pas que ce sont des thématiques, mais plutôt des inspirations. Depuis que je suis publié, je me concentre plus sur une observation du monde extérieur, mais aussi de l’intériorité, la mienne et plus généralement celle de l’humain. C’est toujours quelque chose en miroir, parce qu’écrire seulement sur le monde extérieur, c’est intéressant mais ce n’est pas très incarné. Un autre thème constant est la critique de la société, les défauts, la vanité humaine. Je ne me mets pas en dehors de cette critique, car ces défauts, je les retrouve également chez moi.


Qu’est-ce qui vous a poussé à publier votre premier roman et comment ça s’est passé ?
J’avais déjà envoyé des manuscrits à des éditeurs quand j’étais plus jeune, mais ça ne marchait pas. En 2004, ça a fonctionné car, justement, c’était un ami qui avait une petite maison d’édition, Navarino. Je lui ai montré le texte, il a aimé et ensuite le 2ème roman puis le 3ème ont été publiés. Ça s’est fait très naturellement.
Je suis passé par des phases de découragement face aux refus des éditeurs. Le rejet, il faut savoir que c’est un truc qui risque d’arriver. C’est difficile par moments, je me dis que je ferai mieux de faire du macramé, mais bon je suis nul de mes mains, je ne vois pas quoi faire d’autre [rires].


Vous avez eu plusieurs éditeurs, pourquoi ?
Mes trois premiers livres ont été publiés chez Navarino qui n’existe malheureusement plus. Le 4ème a été accepté par l’Âge d’Homme. Par contre, Sonny n’a a pas été retenu, alors j’ai essayé ailleurs. C’est Hélice Hélas à Vevey qui l’a pris. Toutefois, pour Pouvoir, j’ai dû chercher une autre maison d’édition, les Editions d’en bas. Ça vaut la peine de persévérer, parce que c’est une telle loterie qu’il faut tenter sa chance encore et encore. J’ai eu un petit espoir d’entrer dans la cour des grands quand Gallimard a réédité L’Obscur. Mais malheureusement, ça n’a pas été plus loin.
Tout le monde écrit, personne ne lit. Les éditeurs sont submergés de manuscrits et les réponses peuvent prendre du temps.

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Après avoir discuté de l’aspect éditorial, j’ai questionné Philippe Testa sur son dernier roman Pouvoir. J’ai beaucoup apprécié la trame de fond, l’aspect profond et réfléchi des personnages. C’est incarné, comme le dit Philippe Testa. Malgré ces éloges, il me reste quelques petites questions qui me taraudent.


Pourquoi situer Pouvoir à Paris et non pas aux États-Unis ?
L’élection de Trump a été le point de départ de l’écriture du livre. C’est une très bonne question. J’ai hésité même si je connais assez bien la politique américaine. Par exemple, Sonny commence en Suisse et la deuxième partie se passe aux USA. Mais je pense qu’en fait, je ne connais pas suffisamment bien ce pays et surtout je ne le sentais pas.


Pourquoi ne pas citer les dirigeants desquels vous vous êtes “inspiré»?
Intentionnellement, j’ai voulu faire un truc très flou, pas de dates, le politique n’a pas de noms. C’est un brouillage intentionnel, je ne voulais pas que ça se rapproche trop du mouvement de Marine le Pen. Je voulais que ce soit un truc actuel sans être trop proche de la réalité ou de certaines personnes.
Ce qui est intéressant, c’est que certaines personnes voient Macron pour l’aspect politique du livre, mais moi pas du tout et c’est ça qui est fascinant. Je donne une page blanche et les gens projettent ce qu’ils veulent, c’est une volonté affirmée que ce soit à la fois net et en même temps très flou, d’où l’absence de références directes. Il était important pour moi que les gens se fassent leur propre idée. En gros, c’est un mic mac inspiré de différentes choses, époques et endroits. Ensuite, j’ai tout mis au mixer : le 3ème Reich, les USA, Trump, les autres populistes européens. Je me suis beaucoup documenté et j’ai tout mélangé à ma sauce.

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Petite anecdote de fin qui m’a fait beaucoup rire. Malgré un gros travail de relecture, à la conférence du matin, Philippe Testa a trouvé une faute d’accord du participe passé dans son roman. L’angoisse ! «J’ai vu encore une putain de faute d’orthographe, je suis prof et j’ai honte, lundi matin j’ai une classe de français, je vais leur dire ça : allez-y, lapidez-moi.» Sur ces belles paroles, je souhaite remercier Philippe Testa de m’avoir accordé du temps pour cette interview. Une belle rencontre avec une personne humble, passionnée et surtout passionnante.

Keine typische Wasserglas-Lesung

Das Studio Arici im Stadttheater Solothurn ist schwer zu finden. Eine Zuschauerin soll es vorhin in der Herrentoilette gesucht haben, startet Moderator Daniel Mezger scherzend in das Skriptor Szenisches Schreiben der diesjährigen Solothurner Literaturtage. Im Format Skriptor linsen Zuschauer:innen Textprofis beim «Werkstätteln» über die Schulter. Was das bedeutet? Das Publikum lauscht an diesem Samstagnachmittag den Autor:innen Martina Clavadetscher, Anaïs Clerc, Fabienne Lehmann und Lorenz Langenegger, wie sie den noch frischen unfertigen Dramentext von Schriftsteller-Kollegin Eva Roth diskutieren, interpretieren und kritisieren. Ein ergebnisoffenes Werkstattgespräch also.

Obwohl das keine typische Wasserglas-Lesung ist: erst mal Wasser einschenken. Im Publikum werden noch Kopien von Roths Texts rumgereicht, dann beginnt das Vorlesen der zehn Seiten Textausschnitt. Doch nach den ersten Worten – ein erstes verstohlenes Rüberlinsen zum Textdossier der Sitznachbarin, bald werden verwunderte Blicke im Publikum ausgetauscht, Leute blättern suchend. Bei der kurzen Lesepause zwischen ersten und zweitem Textteil räumt der Moderator entschuldigend ein, dass anscheinend der falsche Ausschnitt verteilt wurde. Aber da haben sich mittlerweile schon alle auf das Hörerlebnis eingelassen (Ausnahme: das kopfschüttelnde, betagte Ehepaar der ersten Reihe). Im zweiten Textteil stimmen die Auszüge auch wieder überein. Alle zufrieden (auch das strenge erste-Reihe-Ehepaar).

Im Anschluss an den Vorleseteil, der sich auf nur zehn Seiten Dramentext beschränkt, macht Anaïs Clerc den beschreibenden, resümierenden Einstieg in die Textbesprechung. Joni, die sechzehnjährige Tochter von Mutter Marit, ist seit drei Tagen verschwunden. Ein Grund zur Panik? Oder ein ‹gewöhnliches› Ausreissen einer Jugendlichen, auf ihrem Weg zum Erwachsenwerden? Wie erlebt es Mutter Marit? Die Lesarten der vorne auf dem Podium Diskutierenden gehen auseinander. Anhand des Verschwindens der Tochter behandelt der Dramentext das Thema Mutterschaft, ja, den aufreibenden Druck der unerfüllbaren gesellschaftlichen Erwartungen an das Konzept «Mutter». Eva Roth lässt Ebenen verschwimmen und nach dem Szenenwechsel befindet sich Figur Marit in einem surreal anmutenden «Traumland». Eine Übermutter, eine «Göttin», (er-)mahnt sie zur Entspannung und massiert ihr die Füsse. Der starke Atlas stützt dabei den Himmel.

Das Werkstattgespräch läuft an, offene Fragen werden angerissen, Fährten freigelegt, Interpretationen aufgestellt und wieder verworfen. Clavadetscher, Clerc, Lehmann und Langenegger machen ihre Beobachtungen direkt an Textstellen fest. Einige Zuschauer:innen bezeugen hie und da mit zustimmenden Geräuschen den geteilten Leseeindruck. Viele Oberkörper im Publikum lehnen sich gespannt nach vorne gen Podium. Dass in den Köpfen eifrig mitinterpretiert wird, beweist die Wortmeldung eines Zuschauers, als sich die Diskussionrunde für Meldungen aus dem Publikum öffnet. Er habe in der Göttin, in der Übermutter, ChatGPT erkannt.

Die Autorin Eva Roth macht sich während des Werkstattgesprächs Notizen, bleibt aber stumme Zuhörerin, gemäss der anfänglichen Abmachung. Erst am Ende der Veranstaltung richten Clavadetscher, Clerc, Lehmann, Langenegger direkt Fragen an Roth als Autorin. Umgekehrt gibt Roth ebenfalls Rückmeldung, welche Punkte sie in ihrer weiteren Bearbeitung des Stücks einfliessen lässt.

Aufgrund des kurzen Textausschnittes arbeitet sich das Werkstattgespräch anfänglich vor allem an offen geblieben Fragen und angeteaserten Leseerwartungen ab, was denn Erkenntnisgewinn schmälert. Dennoch überzeugt das dynamische Veranstaltungsformat vollends. Und wer Eva Roths Stück in voller Gänze sehen möchte, sollte kommenden Montagabend ins sogar Theater in Zürich. In der Reihe der Kaltlesungen lesen dort Schauspieler:innen in Anwesenheit der Autor:innen ein Theaterstück, das noch im Entstehen ist. Eva Roth ist am 22. Mai an der Reihe mit ihrem Stück, das aktuell den sprechenden Titel Der Himmel über Mamiland trägt.

Raphaela Edelbauer mit ihrem Wienroman in Solothurn

Der Andrang bei Raphaela Edelbauers Lesung aus ihrem aktuellen Erfolgsroman «Die Inkommensurablen» ist gross. Dicht gedrängt stehen die Interessierten sowohl im Foyer vor dem Landhaussal als auch auf der Treppe. Moderatorin Esther Schneider lenkt Raphaela Edelbauer durch die Menge, die Autorin müsse noch durch. Die Autorin selbst murmelt sichtlich überrumpelt über das chaotische Anstehverhalten der Zuschauer:innen: «Was machen die Leute?»

Noch chaotischeren Menschenmassen und einer weitaus intensiveren Reizüberflutung begegnet Edelbauers Protagonist Hans bei seiner Ankunft in Wien am frühen Morgen des 30. Juli 1914. Es ist der Tag vor dem Ausbruch des Ersten Weltkrieges. Edelbauers neuster Roman «Die Inkommensurablen» spielt nämlich in den 24 Stunden vor Kriegsausbruch und die Leser:innen folgen drei verschiedenen Protagonist:innen: dem belesenen Bauernsohn Hans, dem adligen Adam und Klara, die im Elendsviertel lebt, aber dank eines Stipendiums Mathematik studiert.

Während die vielfach prämierte österreichische Autorin sich in ihrem letzten Roman «Dave» mit Zukunft und künstlicher Intelligenz beschäftigte, nimmt sich Edelbauer in «Die Inkommensurablen» einem Wien an, das mehr als hundert Jahre zurückliegt. Trotz des historischen Stoffs, sei es ein Roman von grosser Aktualität, betont Moderatorin Esther Schneider. Gerade herrsche ja wieder Krieg in Europa, sei dies gar Ausgangspunkt des Romans gewesen? Edelbauer verneint, der Roman sei zwei Jahre vor der russischen Invasion in die Ukraine entstanden. Überhaupt fände sie es wichtig, kriegerische Gefechte getrennt voneinander zu betrachten und nicht vorschnelle Gemeinsamkeiten herzustellen. Vielmehr sei es Edelbauer darum gegangen, der Kriegsbegeisterung der damaligen österreichische Jugend nachzuspüren. Mit massenpsychologische Phänomenen setze sie sich generell in ihrem Schreiben auseinander. Zudem hatte sie schon immer einen Wienroman schreiben wollen. Anhand der drei Figuren, die alle in anderen «Ständen» aufgewachsen und ’sozialisiert› wurden, habe sie versucht ein umfassendes Panorama des fiebrigen Wiens um 1914 zu erschaffen. Eine Zeit, in der Wien die zweitgrösste Metrople Europas war und das Habsburger Reich noch weitläufige Gebiete umspannte. Sichtlich überrascht sind sowohl Moderatorin Schneider als auch das Schweizer Publikum, als Edelbauer auf die Frage, wie sie denn für den Roman recherchiert habe, antwortet, dass man in Österreich mit der k.u.k.-Zeit quasi aufwachse. Allein in Wien gebe es sehr viele Gründerzeithäuser, die Kaffeehaus-Kultur sei direkt aus der Habsburgerzeit weitergereicht, und schulisch sowie museal sehe man sich ständig mit dem Erbe der Monarchie konfrontiert. Dasselbe Spiel in der Literatur: «Ich habe Josef Roth und Musil inhaliert und ich liebe diese Leute. Aber irgendwann muss man auch mal was anderes machen», formuliert Edelbauer ihr Anliegen, der verbreiteten «Sisifizierung Österreichs» entgegenzutreten.

Selbstverständlich hat Edelbauer im Schreibprozess auch auf historische Quellen zurückgegriffen, beispielsweise viele Briefe von der Front gelesen. Doch in keiner Weise sei intendiert gewesen, eine historisch-naturalistische Sprache der Jugend in der Zeit des Ersten Weltkriegs zu imitieren, wie zum Teil im Feuilleton behauptet und bemängelt wird. Ihr Ziel sei von Anfang an eine Kunstsprache gewesen, die in grossen Teilen konventionell und nüchtern erzählt und in Passagen, wo die Figuren in die Wiener Subkulturen des Rausches abtauchen, ins Traumhafte übergeht. Die Herausforderung im Schreiben habe darin bestanden, den Krisenstaat des Kaiserreichs glaubhaft zu skizzieren, ohne den Figuren vermessene, überspitzte Inhalte in den Mund zu legen, und trotzdem sicherzstellen, dass auch Leute, die nicht in Österreich aufgewachsen sind, die Nuancierungen und den eingeflochtenen Humor verstehen.

Als plötzlich das Licht angeht, bricht leises Gemurmel im Saal aus. Fünfundvierzig Minuten sind schnell herum, wenn man sich angeregt über Literatur unterhält. Doch die zeitliche Punktlandung und verknappte Abschlussfloskel von Moderatorin Schneider entlässt die Zuschauer:innen etwas irritiert in die nächste Veranstaltung.

Wenn Erlebtes nicht gehört wird

Schwere, rote Samtsessel, gedimmtes Licht. Der Theatersaal des Solothurner Stadttheaters vermittelt die passende Stimmung für den düsteren Stoff, den Sarah Elena Müller in ihrem Roman Bild ohne Mädchen entspinnt. Mit Moderatorin Salomé Meier bespricht die Autorin ihren ersten veröffentlichten Roman.

Müllers Protagonistin wächst bei ihren antiautoritär erziehenden Eltern auf. Sie kümmern sich kaum um das Kind, beschäftigen sich lieber mit ihrer Arbeit als Bildhauerin und Biologe. So ist das Mädchen oft zu Besuch beim Nachbarn Ege, einem Medientheoretiker, der pädophile Neigungen zeigt und das Kind in seinen Filmen mitspielen lässt.

Das Kind kann das Erlebte nicht in Worte fassen – und auch wenn: Es nähme sich keiner den Sorgen der Tochter an. Sie wird permanent übersehen. „Deine Geschichte wurde nur erlebt, nicht gehört.“ So lautet ein Schlüsselsatz aus der Passage, die Müller vorträgt. Über ihre Position als Autorin und Urheberin der Geschichte sagt Müller: „Ich bin die einzige Person, die das Kind ernst nimmt.“

Das Scheitern der Sprache ist für die 33-Jährige ein wichtiges Thema im Buch: „Es existiert der Konsens, dass Sprache verständlich sein soll. Dabei gibt aber auch Formen der Sprache, in denen sie nicht verständlich ist.“ 

Während Sarah Elena Müller Passagen aus ihrem Buch vorliest, ist es mucksmäuschenstill im Saal. Mit grosser Sensibilität und viel Einfühlungsvermögen beschreibt die Schriftstellerin die kindlichen Gebärden des Mädchens, wie es sich beispielsweise Mückenstiche aufkratzt und die Bluttropfen mit Taschentüchern auftupft, wie es diese ‚verzierten’ Tücher aufbewahrt – stolz darauf, etwas geschaffen zu haben. Gleichzeitig stellt sich bei den Zuhörer:innen ein mulmiges Gefühl ein, wenn das Kind aus dem Fenster hinüber zur Wohnung des Nachbarn blickt und die geschlossenen Jalousien bemerkt. Die Leser:innen erleben die Perspektive des Kindes, wissen aber doch mehr.

So macht es den Eindruck, dass sich die junge Autorin einem äusserst schwierigen Thema auf subtile, angemessene Art und Weise genähert hat. Das Publikum hat Sarah Elena Müller auf jeden Fall in ihren Bann gezogen.

Raketen Solothurn vs. Die Schriftsteller-Nati

Es ist ein bewölkter Samstagnachmittag im Stadion FC Solothurn und ein kühler Wind zieht durch die Holztribüne. Die Teams laufen auf. Die Raketen in Schwarz Grün, die Schriftsteller-Nati in Blau. Der Autor Peter Bichsel, Solothurner Urgestein, Mitinitiant der Solothurner Literaturtage und Ehrenspielführer, mit Krücken in beiden Händen, gibt traditionsbewusst den Ehrenkick zu beginn.

Frühe Entscheidung

Um Punkt 13:00 Uhr pfeift der Schiedsrichter die Partie an. Die Schriftsteller-Nati, die einen merklich tieferen Altersdurchschnitt aufweist, hat Anstoss. Die Partie beginnt und beide Teams haben keine Zeit für ein langsames Abtasten. Bereits in der sechsten Minute wird der Torwart der Raketen getestet und keine fünf Minuten später, in der elften Spielminute, staubt der Stürmer der Schriftseller-Nati, nach einem Lattenschuss, zum 1:0 ab. Der frühe Rückstand zeigt den Raketen, dass ihre Gegner sie nicht schonen werden.

Und geschont werden sie auf keinen Fall. In der 15. Spielminute hebt ein Steilpass die gesamte Verteidigung der Raketen auf. Der Torwart kommt raus um den Raum zu verkleinern und wirft sich dem Schriftsteller in den Weg. Der Einsatz des Torwarts ist vergeblich. Er kann weder das 2:0 durch einen Lupfer verhindern, noch kommt er Heil aus dem Zweikampf. Er muss interim durch einen Feldspieler ersetzt werden.

Das nächste Tor lässt nicht lange auf sich warten. Nach ungefähr 10 Minuten rennt die Nummer 17 der Schriftsteller-Nati im Alleingang durch die Verteidigung der Raketen und schiesst eiskalt das 3:0. Den Raketen wird aber keine Zeit gegeben um den Schock zu verarbeiten. Kurz nach dem Anstoss fällt bereits das 4:0 in der 26. Spielminute, nach einer Flanke von Rechts. Das Spiel ist bereits klar entschieden, aber die Schriftsteller-Nati kennt kein Pardon. Kurz vor dem Ende der ersten Halbzeit überschlagen sich die Ereignisse. In der 29. Minute und kurz darauf in der 30. Minute wird mit Leichtigkeit auf 5:0, respektive auf 6:0 erhöht. Der Schiedsrichter pfeift beinahe aus Mitleid zum Ende der ersten Halbzeit.

Ungebrochener Kampfeist

Das Gewinnerteam steht bereits fest. Die Raketen können wohl nur noch auf einen Ehrentreffer hoffen. Aus den Rängen sind erste Befürchtungen eines «Stängeli» (einem 10:0) zu vernehmen.

Die zweite Halbzeit beginnt und damit die Suche der Raketen nach dem Ehrentreffer. Ihr Kampfgeist ist auch mit dem hohen Rückstand nicht gebrochen und sie preschen nach vorne. Ein Abschluss in der 35. Minute führt zu einem Eckball der aber nicht weiter verwertet werden kann. Trotzdem kämpfen die Raketen weiter und erzielen nach hartem Kampf den Ehrentreffer. Es steht damit 6:1 in der 42. Spielminute. Die Partie ist damit aber noch nicht zu Ende und die Schriftsteller-Nati weist das gegnerische Team in seine Schranken mit dem 7:1 in der 48. Minute. In der 55. Minute treffen die Raketen zum letzten Tor der Partie, zum 7:2. Dies bildet auch das Ende der Highlights einer durchaus unterhaltenden Partie.

Der Schlusspfiff ertönt und die Teams trennen sich mit dem Endresultat von 7:2. Nach fairem Abklatschen werden die Lokalmatadore von ihren Fans für ihren unermüdlichen Einsatz gebührend gefeiert. Die Schriftsteller-Nati hat ein Gedicht auf dem grünen Rasen abgeliefert, während die Raketen eine Fehlzündung erlitten haben. Nach dieser Vorführung können wir uns bereits auf die Revanche nächstes Jahr freuen.

Einblicke in geschlossene Gesellschaften

Eigentlich hat Tabea Steiner nie darüber schreiben wollen. Doch nach und nach habe sie den Drang verspürt, über das Erlebte, über die Strukturen und Machtverhältnisse nochmals genau nachzudenken. Warum habe sie sich damals eingezwängt gefühlt? Am Ende der Recherche steht ein Buch: Immer zwei und zwei; über das Leben, Leiden und Lieben in einer Freikirche – und darüber hinaus.

Mit Mariann Bühler als Moderatorin, selbst Autorin und Literaturveranstalterin, füllt Tabea Steiner an diesem Samstag Morgen den Landhaussaal. Ihr erster Roman Balg war 2019 bereits für den Schweizer Buchpreis nominiert; Immer zwei und zwei ist diesen Februar erschienen. Der Roman erzählt von Natali, die einer Freikirche angehört und mit ihrer Familie – einem Mann und zwei Töchter – eigentlich perfekt in die Weltanschauung dieser Gemeinschaft passt. Doch Natali verliebt sich in eine Frau und sieht für ihre Töchter auch eine andere Zukunft, ausserhalb von Sonntagsschule, väterlicher Bevormundung und teilweise angsteinflössenden Weltvorstellungen.

Steiner ist selbst in einer streng religiösen Gemeinschaft aufgewachsen, hat sich aber als junge Erwachsene von dieser loslösen können. Die Recherche zu Immer zwei und zwei habe also vor allem aus dem Nachdenken über diese Zeit, über die Strukturen und Mechanismen dieser und ähnlicher Gemeinschaften bestanden. Erst vor kurzem habe sich Steiners alte Gemeinde übrigens aufgespalten: «Dieses Mal ging es um die Art der Musik, die in der Gemeinde gespielt werden darf. Früher ging es auch mal um die Frage, ob Frauen Röcke tragen müssten oder nicht».

Nachdem sie die Freikirche verlassen habe, habe sie vor allem erst einmal beobachtet. Als Primarlehrerin habe sie etwa in viele Lehrerzimmer Einblick gehabt und festgestellt, dass die gar nicht so anders seien als evangelikale Gemeinden; beide funktionierten über ungeschriebene Codes: «Da hat man die falsche Tasse genommen, sich an den falschen Platz gesetzt oder ist nicht zur richtigen Zeit zum Kopierer gegangen.» Einmal habe ihr eine Kollegin im Lehrerzimmer zugeflüstert: «Die, die da oben am Tisch sitzt: deren Vater hat ihre Mutter verlassen, weil er jetzt schwul ist.» Da bleibt einem das Lachen im Halse stecken.

Der Inhalt des Buches stand also relativ schnell fest. Doch an der Sprache habe sie feilen müssen. Wie bringt man so ein Umfeld, die Denkweise rüber? Immer zwei und zwei ist in zwei Teile, A und B, aufgeteilt, was an die Kassetten aus der Kindheit der Protagonistin Natali erinnert. Teil A besteht aus den Perspektiven der drei zentralen Frauenfiguren: Natali, Kristin und Rosalie. Rosalie habe ihr besonders leidgetan, da sie dann doch mit Tobias zusammenkommt. Ihre Perspektive sei eine besonders wichtige und an dieser Figur lasse sich auch eine Dynamik aufzeigen, die insbesondere Frauen in den Freikirchen betreffe: Als unverheiratete, kinderlose Frau solle sie eben verheiratet werden, um möglichst viele Kinder zu bekommen und so zum Fortbestand der Gemeinschaft beizutragen.

Teil B dann trage für Steiner gewissermassen eine Glasur. Wie beim Töpfern, wo die Glasur das Gefäss überziehe, würde dieser Teil die Konflikte nur unter der Oberfläche durchschimmern lassen; Familien und Gemeinde versuchten hier, das perfekte Bild zu wahren. «Bevor es in solchen Gemeinden zum Streit kommt, wird bei Meinungsverschiedenheiten schnell das Thema gewechselt – oder ein Lied angestimmt.»

Die einzelnen Abschnitte sind kleine Fenster, die unter der Oberfläche versteckte Konflikte vermuten lassen. Das Buch könne man sich auch vorstellen wie das Teppich-Bildnis aus dem freikirchlichen beziehungsweise allgemein-christlichen Diskurs: Vom Teppich ist nur die Unterseite sichtbar. Die Fäden sind scheinbar wirr angeordnet, folgen keiner erkennbaren Logik. Erst von oben – aus dem Himmelreich – erkennt man das wunderschöne Muster. Eine Metapher für das Leben und die verschlungenen, unergründlichen Wege Gottes.

Steiner spricht auch über das «Fehlen der Theologie». Da würde ein Prediger – «Ich wollte gerade gendern, aber es ist wirklich der Prediger» – seine persönliche Beziehung zu Gott zur Grundlage seiner Weltanschauung und der Predigt machen und dadurch teilweise unglaubliche Macht ausüben. Durch die fehlende theologische Einordnung der Bibelverse könne jeder aus allem herauslesen, was er wolle. Die Figur Kristin fungiert da als Gegenpol, zeigt eine andere Realität mit göttlichem Bezug auf, die eben diese Einordnung, auch die Einordnung der Kirche in zeitgenössischen Diskursen, zum Beruf habe. In diese Figur wird sich Natali verlieben.

Das Publikum schmunzelt häufig; bei einzelnen Passagen und Pointen lacht es herzlich. Wieviele tatsächlich eigene Erfahrungen mit Freikirchen gemacht haben, ist schwer abzuschätzen. Aber genau hier liegt auch Steiners Verdienst, denn ihr Buch ist keine Abrechnung. Es geht sowohl mit den Figuren als auch mit tatsächlichen Glaubensgemeinschaften dieses Schlags respektvoll um und schafft es über diesen Respekt, Empathie zu wecken und das Menschliche hinter den Strukturen zu erfassen. So auch das persönliche Fazit der Moderatorin Bühler: Für sie sei das Buch auch eine Einladung gewesen, die eigenen Normen und Werte zu hinterfragen, die eigenen Strukturen zu überdenken.

«Le Colibri» gewinnt den Schweizer Kinder- und Jugendbuchpreis

Hélène Becquelin und Elisa Shua Dusapin gewinnen mit ihrer Graphic Novel Le Colibri den Schweizer Kinder- und Jugendbuchpreis 2023.

Zum Anfang der Veranstaltung flackern kurze Videovorstellungen der fünf Werke über die Leinwand, die es auf die Shortlist geschafft haben. Stefan Schröter, der Jurypräsident, verrät den Anwesenden, dass über die Auswahl der Bücher dieses Jahr mehr diskutiert wurde als üblich. Aus über 120 Einsendungen von 75 Verlagen – über die Hälfte davon Bilderbücher – hat sich die Jury schlussendlich für diese Handvoll entschieden. Susanne Kunz, die den Abend wieder einmal mit Leichtigkeit und Humor viersprachig moderiert, sucht kurz das Gespräch mit allen Autor:innen und Illustrator:innen.

Die Shortlist-Bücher

Der Illustrator Niels Blaesi, der leider nicht anwesend sein kann, weil er gerade in New York ist, hat mit seinem ABC Schweiz das traditionelle ABC-Buch neu interpretiert. Er erzählt mit bunten, plakativen Bildern eine Reise durch die Schweiz, von A wie Alphorn bis Z wie Zürich. Sein Verleger Richard Harvell, der ihn an der Preisverleihung vertritt, erzählt, Blaesi habe gerade in dieser traditionellen Vorlage viel Freiraum für Neues entdeckt und sei spielerisch mit Formen und Farben umgegangen.

Im Bilderbuch Il grande alveare von Elanor Burgyan und Giorgio Volpe darf das Dachskind zum ersten Mal Theaterluft schnuppern. Es entdeckt dort eine magische Welt. Burgyan sei bereits seit Kindesalter vom Theater begeistert, verrät sie Kunz. Volpe betont die Wichtigkeit des Laientheaters, denn durch das Theater fänden die Menschen zu sich selbst.

Lea und Finn langweilen sich von Tom Reed experimentiert mit dem Medium Buch. Zwei Hunde sind mit ihrem Platz auf einer leeren Seite nicht zufrieden. Mit einem Sprung in den Spalt zwischen den Seiten starten die beiden eine abenteuerlichen Reise durch historische Gemälde und Fotografien. Das Buch handle eigentlich gar nicht von der Langeweile, klärt Reed auf, der deutsche Titel sei etwas irreführend. Eigentlich gehe es ihm um folgende Redewendung: «Das Gras ist auf der anderen Seite immer grüner».

Le Livre bleu vom Ehepaar Albertine und Germano Zullo ist ein grossformatiges Bilderbuch in satten Farben, eine Ode an die kindliche Fantasie beim Vorlesen. Wieso das Buch blau sei und nicht grün oder rot, möchte Susanne Kunz wissen. Blau stehe für Freiheit und Unendlichkeit, erwidert Germano Zullo.

Das prämierte Buch

Das Gewinnerbuch Le Colibri erzählt die Geschichte eines Jungen in der Pubertät, der nach einem Verlust und Umzug dank einer neuen Freundin wieder aufblüht. Die Graphic Novel «erzählt tiefgründig und berührend von bedeutenden Übergängen im Leben eines Jugendlichen», begründet die Jury ihren Entscheid. Zudem hebt sie hervor, es werde «vieles angesprochen, aber nicht alles gesagt», was Raum für Interpretation und Identifikation lässt.

Kunz fragt Illustratorin Hélène Becquelin, wie sich die Zusammenarbeit mit der Autorin Elisa Shua Dusapin (die nicht anwesend sein kann) gestaltet habe. Sie hätten eigentlich gar nicht wirklich zusammengearbeitet, erklärt Becquelin lachend. Shua Dusapin habe ihr sehr viel Freiheiten bei der grafischen Bearbeitung des Textes gelassen. Zudem sei sie immer sehr glücklich mit ihren Entscheidungen gewesen, so etwa der Situierung der Geschichte in der Normandie.

Stefan Schröter verkündet zum Schluss ohne viel Aufhebens die Gewinnerinnen, es gibt eine Urkunde, Blumen und viele glückliche Gesichter. Der vom SBVV, dem SIKJM und den Solothurner Literaturtagen getragene Preis ist mit 10’000 Franken dotiert. Becquelin freut sich sichtlich darauf, die guten Nachrichten an Shua Dusapin weiterzuleiten.

Monstre em(ti)pathique

C’est avec les lacets de ses Dr Martens détachés que Séverine Cornamusaz monte sur scène à l’occasion du troisième jour du festival littéraire soleurois. Elle ne perd pas l’équilibre pour autant et c’est sans faux pas qu’elle nous annonce la diffusion de son film Coeur Animal, adaptation cinématographique du roman Rapport aux bêtes (2002) de Noëlle Revaz.

Elle avoue d’emblée que Rapport aux bêtes n’est pas le livre à adopter dans le but d’une transposition au cinéma. Alors pourquoi ce choix ? Pour Rosine, sa grand-maman. Pour son histoire. Pour son univers qui résonne avec celui de Rapport aux bêtes.

Rosine donne son nom à la protagoniste féminine de Coeur animal. Cette femme est forte, elle a une voix et surtout un prénom, contrairement au personnage de «Vulve» du roman de Noëlle Revaz.

Impatiente d’entendre la voix de Rosine et celle de sa créatrice cinématographique, j’attends que les lumières s’éteignent et que les applaudissements se taisent…

Et là je reconnais. La vue sur la plaine du Rhône, les pics montagneux entourant Anzeindaz, les routes sinueuses, l’ancien hôpital de Monthey, l’hélicoptère d’Air Glacier, les roseaux des Grangettes, la maison où j’ai grandi.

Paysages chers à mon coeur, dans lesquels se cache une histoire à glacer le sang: un couple archaïque dans lequel Rosine est mariée à Paul, un homme aussi rustre que les animaux de son alpage isolé. Version sans euphémisme: Paul, un «pauvre type avec du fumier entre les orteils», un violeur, un monstre. Les nombreux plans rapprochés soulignent la dureté de ses traits et la violence de ses mains.

Étrange sensation pour Paul lorsqu’Eusebio, le garçon de ferme étranger, lève la main sur lui, rétorque, le reprend. «Le père, c’est sacré.» «Non, le sacré c’est la mère.»

Et mauvais pressentiment lorsqu’il voit que l’air chantant de cet ouvrier espagnol commence à toucher Rosine, à lui amener un peu de paix dans cet alpage d’enfer.

Et si Rosine partait ? Et si Paul se transformait ?

Avec en musique de fond les clochettes des chèvres, le bruit de la pluie, le beuglement du bétail, on se laisse guider vers les réponses que Séverine Cornamusaz donne à ces questions et on la regarde dessiner SA fin.

Le générique du film défile. La salle est silencieuse. Nous sommes… heurtés, touchés, en colère, en peine… Les bottes de pluie des protagonistes ont disparu de l’écran et ce sont les Dr Martens de leur créatrice qui réapparaissent.

Elle souligne une frontière sensible entre empathie et répulsion. Séverine Cornamusaz avoue avec assurance offrir une rédemption à Paul. Mais le public ne se prononce pas. Demeure silencieux. Peut-être encore choqué de la violence de certaines images, peut-être perdu dans l’immensité du décor montagnard, peut-être touché par les échos à des drames personnels. Offre-t-on notre pardon à Paul ? Notre aversion à son égard persiste-t-elle?

Les portes du Kino im Uferbau se referment et ces questions flottent dans l’air à la manière de la brume sur les pics entourant le plateau d’Anzeindaz.